Déformer un solide peut modifier sa mouillabilité… ou pas !
Les élastomères, des matériaux mous comme le caoutchouc, ne voient pas leur tension de surface se modifier quand ils sont soumis à une déformation contrairement à ce que prévoyait une première étude. C'est le résultat d'une recherche franco-canadienne publiée dans Nature Communications, dont le Laboratoire ondes et matière d'Aquitaine - LOMA est signataire.
- 29/05/2018
La bulle de savon, la goutte de rosée… Ces formes particulières, arrondies, sont les parfaites illustrations des phénomènes qui se produisent à l’interface entre un liquide et l'air. À la frontière entre les deux milieux, les molécules se retrouvent un peu isolées de leurs semblables, ce qui engendre alors une « tension de surface » qui tend à réduire les surfaces, et donc à créer des formes sphériques.
Ces phénomènes d’interface sont également observés entre un solide et un liquide. Une goutte d'eau déposée à la surface d’un solide, par exemple, s'étale plus ou moins selon la « mouillabilité » du matériau. Les ingénieurs cherchent par exemple à développer des parebrises et des ailes d’avion sur lesquels l’eau aura tendance à ne pas s’étaler pour mieux être évacuée, alors qu’une peinture optimale aura tendance au contraire à bien s’étaler sur un mur. Cette mouillabilité peut être quantifiée par la mesure de « l’angle de raccordement » ou angle de contact (voir figure). Plus l’angle est petit, plus on dit que le liquide "mouille bien" le solide.
Mais à l'automne 2015, Leiden, Pays-Bas, une conférence internationale voit naître une vive controverse. Les résultats d’une expérience pionnière sur les élastomères, cette matière molle à la frontière entre liquides et solides, surprennent. Soumis à déformation, ces matériaux verraient leurs propriétés de surface varier.
Trois ans plus tard, une étude franco-canadienne pourrait bien mettre fin à la polémique en montrant que les élastomères ne voient pas leur tension de surface se modifier quand ils sont soumis à une déformation, contrairement aux solides cristallins et aux verres, et contrairement à ce que prévoyait la première étude. Ce travail, fruit d’une collaboration internationale entre chercheurs du département de Physique et d’astronomie de l’université de McMaster (Canada), du laboratoire Gulliver(CNRS/ESPCI Paris), et du Laboratoire ondes et matière d’Aquitaine (LOMA, unité CNRS et université de Bordeaux) est paru dans Nature Communications. Le bordelais Thomas Salez, médaille de bronzedu CNRS 2018, est l'un des signataires.
Pour en savoir plus : En direct des laboratoires de l'institut de Chimie du CNRS